Communiqué de presse : Recours devant le Conseil de l’Europe : les interdictions persistantes de la mendicité, 30 ans après sa dépénalisation, portent atteinte à un droit fondamental

Dans une réclamation collective, le Mouvement ATD Quart Monde International et la Fédération internationale pour les droits humains avec la Ligue des droits humains, demandent au Comité européen des droits sociaux du Conseil de l’Europe de contraindre la Belgique à reconnaître dans un texte légal le droit de mendier, si la mendicité est nécessaire à la préservation de la dignité humaine. Aujourd’hui, la mendicité reste inévitable dans plusieurs situations. Cependant, plus de la moitié des villes et communes ont adopté des règlements locaux pour l’interdire partiellement, voire parfois totalement. Or, dans l’arrêt Lacatus contre Suisse du 19 janvier 2021, la Cour européenne des droits de l’homme a affirmé pour la première fois un droit de mendier. Il doit être effectif.

Des restrictions à géométrie variable

Interdiction de mendier, sans détour, dans une commune sur six en Belgique. Ailleurs, les restrictions sont à géométrie variable, selon les communes. Autorisation de mendier, sauf le dimanche. Sans enfants. Par deux uniquement. Pas devant la gare, le cimetière. Interdit dans des rues commerçantes. Autorisé, mais à plus de 100 mètres de la fête foraine. Après 18 heures. Sans animal « potentiellement dangereux ou risquant de le devenir ». Sur les 581 villes et communes que compte la Belgique, 305 disposent d’un règlement sur la mendicité. Et la majorité de ces règlements (253) reprennent des dispositions qui sont contraires aux droits humains, selon un rapport du 4 mai 2023 de l’Institut fédéral des droits humains et du Service de lutte contre la pauvreté qui les ont analysés.

La Belgique viole plusieurs dispositions de la Charte sociale européenne

La majorité des restrictions imposées par les villes et communes contreviennent à plusieurs droits consacrés par la Charte sociale européenne que l’État belge a pourtant ratifiée : le droit de la famille à une protection sociale, juridique et économique et le droit à une protection contre la pauvreté et l’exclusion sociale. Les règlements qui limitent ou interdisent la mendicité visent aussi particulièrement une population qualifiée par les autorités publiques de « Roms », ce qui rend la Belgique responsable de discriminations, selon les associations requérantes. Par ailleurs, la jurisprudence du Conseil d’État a déjà confirmé le droit de mendier « si la mendicité est nécessaire à la préservation de la dignité humaine ». Et le Conseil d’État de préciser que « la mendicité ne peut être considérée comme un trouble à l’ordre public en soi ».

Un droit de mendier, consacré dans une loi

La Fédération internationale pour les droits humains et le Mouvement ATD Quart Monde International introduisent une réclamation collective devant le Comité européen des droits sociaux, afin que le droit de mendier soit pleinement reconnu en Belgique. Ce Comité contrôle le respect, par les États parties, de la « Charte sociale révisée » du Conseil de l’Europe que la Belgique a ratifiée. Ces associations demandent que le droit de mendier, si ce droit est exercé pour vivre ou tenter de vivre conformément à la dignité humaine, soit inscrit dans une loi applicable partout en Belgique. Les restrictions à ce droit doivent être limitées et strictement circonscrites. Il faut également supprimer toute sanction pénale ou amende administrative qui frapperaient les personnes qui mendient pour vivre.
Trente ans après la dépénalisation de la mendicité, il est temps de mettre fin aux contradictions actuelles et à ces règlements locaux qui limitent voire interdisent aux personnes de mendier. La mendicité n’est qu’un symptôme de la pauvreté qui grandit. C’est celle-ci que les politiques publiques doivent condamner.

 

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