Les thématiques abordées ont fait l’objet de débats lors des Universités populaires Quart Monde ou de réunions de travail dans le cadre des rapports « Citoyenneté et pauvreté » et «Durabilité et pauvreté » rédigés par le Service de lutte contre la pauvreté. Elles traduisent sur le plan politique les aspirations des participants.
Porter les allocations sociales au niveau du seuil de pauvreté européen. En 2014, le Gouvernement sortant avait pris un engagement fort en ce sens, mais il ne l’a pas tenu. Aussi longtemps que ces allocations demeurent en dessous du seuil de pauvreté, le droit constitutionnel garanti à chacun de mener une vie conforme à la dignité humaine reste bafoué. Les personnes subsistant en dessous de ce seuil sont condamnées à la dépendance et à la survie précaire, elles sont privées de leur citoyenneté. Il est intolérable qu’en Flandre, un enfant sur cinq risque de grandir dans la pauvreté, en Wallonie un enfant sur quatre et à Bruxelles un enfant sur trois.
Favoriser le droit de vivre en famille. Le système actuel, et plus particulièrement le statut de cohabitant, décourage les bénéficiaires d’allocations sociales de progresser financièrement et socialement en vivant ensemble, comme famille, comme citoyen solidaire et comme cohabitant. Ce statut qui implique de nombreux contrôles intrusifs porte atteinte à leur vie privée, enfreint leur liberté de choisir avec qu’ils veulent vivre, même au sein de leur famille et sape leur solidarité. Nous souscrivons au rapport 2017/18 publié par le Service de lutte contre la pauvreté auquel nous avons collaboré.
Une campagne visant à supprimer ce statut a été lancée par la Ligue des familles.
Garantir à tous un logement décent tel qu’inscrit dans la Constitution, en menant une politique ambitieuse de construction de logements sociaux adéquats et en prenant toutes les mesures garantissant qu’il n’y ait pas d’expulsion sans relogement approprié. Une des premières responsabilités d’un pays est de loger correctement tous ses habitants. Or, les logements sociaux disponibles continuent à faire cruellement défaut. De plus, dans les trois régions, les législations actuelles visent à favoriser les bailleurs au détriment du droit au logement pour tous. L’absence de logement décent porte en outre atteinte au droit de vivre en famille puisque, selon les services de la jeunesse eux-mêmes, il y a une corrélation entre un logement inadéquat et le placement d’enfants.
Assurer à tous les travailleurs, et particulièrement aux chômeurs de longue durée, le droit au travail librement consenti dans des conditions correctes et moyennant une rémunération équitable. En mobilisant tous les acteurs de la société, on peut atteindre cet objectif si on part d’abord des compétences et des projets de ces chômeurs, avec le souci de répondre prioritairement aux besoins de la population et non à la logique financière des entreprises. À cet égard, l’expérimentation française « Territoire zéro chômeur de longue durée » peut inspirer une politique dynamique incluant les demandeurs d’emploi de longue durée. Il est indigne de les considérer comme « non mobilisables » et définitivement inaptes à intégrer un travail.
Assurer le droit de l’enfant à l’éducation sur la base de l’égalité des chances, ce qui implique que l’école valorise tous les élèves au lieu de sélectionner et organise la collaboration plutôt que la compétition. Cela passe de l’orientation subie à l’orientation choisie, et de l’enseignement partiellement subsidiée à l’enseignement vraiment gratuit.
Avoir les ambitions d’un développement durable. la politique climatique et environnementale qui nécessite des mesures urgentes et nécessaires, doit, comme le mentionne la proposition de la loi CLIMAT initiée par les universités « être socialement équitable, promouvoir la biodiversité, lutter contre la pauvreté et réduire les inégalités ». Elle suppose une participation active des populations les plus défavorisées, prenant en compte leur expérience et l’analyse. Se soucier de notre planète et d’une prospérité suffisante, c’est toujours placer les personnes (les plus vulnérables) et le vivre-ensemble dans la solidarité au centre de nos préoccupations. Les personnes en situation de pauvreté sont plus souvent exposées aux effets de la dégradation environnementale, etc., alors que, dans chaque pays, leur empreinte écologique est inférieure à la moyenne et que leurs moyens de protection/adaptation sont très limités. Cette politique ne peut atteindre ses objectifs que si elle s’accompagne d’une redistribution des richesses et des matières premières. Elle doit prévoir des systèmes de subventions qui garantissent avant tout que ces personnes les plus exposées puissent jouer leur rôle dans le progrès et ne soient pas exclues du champ d’action. À défaut, l’objectif numéro 1 du développement durable tel que défini par l’ONU « pas de pauvreté » reste lettre morte, ce qui met en péril l’ensemble des 17 objectifs.